(001) maman est partie un matin. une pauvre note sur la table de la cuisine. "j'y vais, il y a de quoi manger dans le frigo pour une semaine. adriel pense à passer à la pharmacie. je vous aime." son poing rencontrait le mur pour huitième fois de sa vie et certainement que la maison aurait pu être vendue plus chère s'ils avaient pu reboucher les trous.
(002) elle a toujours été là, dans les parages. toujours à partager son goûter, à le traiter d'idiot quand il tombait en skate sans protection. toujours à prendre sa défense dans les couloirs du lycée, même contre les gros durs, toujours à soigner ses mains et ses bleus après les gros combats. allie et ses beaux yeux peuvent apaiser toute la douleur du monde, surtout celle qui gronde dans son coeur.
(003) la boxe pour canaliser son trop plein d’énergie, pour apaiser toute la violence qu’il retient en lui depuis son plus jeune âge. parce qu’il a jamais été intéressé par le football adriel, a toujours trouvé qu’ils en faisaient trop à mettre autant de protections pour un jeu qui s’arrête chaque fois qu’il y a contact. et puis il a toujours été habitué à se battre adriel, que ce soit pour défendre allie contre les garçons qui voulaient l’embrasser sans sa permission ou pour protéger silas des mecs à qui il tentait de voler la copine. on a tenté de lui apprendre que frapper dans un mur ne lui apporterait rien d’autre que de la douleur et c’est enfin rentré, enfin presque. il enfile les gants adriel, mais il continue de frapper dans les murs.
(004) c’était juste pour payer les soins médicaux de son père. Il le promet sur la bible adriel au moment où il lève la main droite dans un costume trop serré pour lui, la cravate qui l’étrangle. Ii peut sentir dans leurs regards qu’on ne le croit pas, qu’on doit le prendre pour un de ces gamins qui veulent se payer le dernier téléphone ou bien se droguer, mais il le promet avec toute son âme, que les combats clandestins c’était juste pour les soins médicaux, rien de plus.
(005) les plaques militaires sortent du tee-shirt parfois, quand il se penche sur les moteurs qu’il tente de réparer au mieux. parfois dans son lit, il reste des heures à les regarder, les analyser, se dit qu’il devrait faire comme son père et tout quitter pour partir au front. et tant pis s’il revient avec un putain de cancer, au moins il saura pour quoi est-ce qu’il est en train de mourir.
(006) il peut sentir chacun des regards sur lui quand il foule le sol du lycée. et il ne peut pas croire qu’il soit encore obligé d’y aller. il peut entendre les murmures quand il passe, comment on s’écarte quand il approche. y’a de la peur dans leurs regards, de la colère aussi et tellement d’incompréhension. parce qu’avant tout ça, c’était peut-être le mec bizarre adriel, mais i était cool, gentil, à défendre les plus persécutés. il était de ces mecs cool, qu’on apprécie sans même connaître, mais ça c’était avant. maintenant c’est l’enfoiré qui a démoli le plus grand espoir de la ville sans aucune raison. le pauvre gars a été fracassé et a failli y rester et tout accusait adriel, parce que c’était le mec d’allie et chacun sait ce qu’il arrive à chacun des copains qu’allie a fréquenté, des menaces surtout et des coups parfois, quand ils lui ont fait du mal. alors il y a eu arrestation, prison provisoire et procès et finalement un manque de preuves et il est relâché adriel, avec la promesse qu’on finira par le coincer tôt ou tard. mais vivre à reno, remettre les pieds dans ce lycée tout en étant à howard, s’éloigner d’allie et les regards ? c’est pire que la prison.
(007) c’est pas lui, il l’a répété mais on l’a pas écouté, parce que sans ce fameux manque de preuves, il serait derrière les barreaux aujourd’hui. une punition pour avoir arrêté les combats, parce qu’il ne pouvait plus se regarder dans une glace sans avoir honte. mais c’était la poule aux oeufs d’or adriel, alors on lui a fait comprendre qu’il n’aurait pas dû arrêter. après le procès on lui a avoué une chose, c’était ça ou allie et puis y’a une prise de conscience et une prise de décision. la distance est mise entre lui et celle qu’il considère comme sa meilleure amie. pour la protéger, pour son bien à elle.
(008) un malade qui frappe par jalousie peut-être, mais un gentleman. adriel il a jamais regardé sous les jupes des filles, il les a toujours défendues dans les couloirs de l’école, il leur a toujours ouvert la porte, laissé passer, demander le consentement pour embrasser. il y en a pas eu beaucoup, des filles dans son lit, tellement qu’on se pose des questions et on balance qu’il y est gay et il secoue la tête adriel, parce qu’il est fatigué de ses mecs qui pensent qu’un homme qui respecte les femmes, c’est forcément un homosexuel.
(009) une vieille impala qu'il a retapé avec son père, son bien le plus précieux et il peut se séparer de beaucoup adriel, mais pas de ça, pas de sa voiture. c'est son bébé, c'est sa vie et suspendu au rétroviseur on peut même y trouver le chapelet de son grand-père.
(010) les vêtements noirs ; le perfecto usé ; les cigarettes de la marque rouge et blanche ; les phalanges toujours abîmées ; l'odeur du goudron après la pluie et du froid ; les mains douces malgré son sport ; les sweats à capuche ; la vodka et la bière ; les muscles développés plus à force de soulever son père que grâce à l'entraînement ; les bombes de peinture dans le coffre ; hamlet sur la table de chevet ; le casier piégé, tagué, défoncé ; toujours à faire tourner des trucs, stylo, handspinner, cigarette, allumette, clé à molette ; la photo de lui et allie quand ils avaient huit ans ; les balades et le footing avec banjo tôt le matin ou tard le soir.
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