like a hurricane | ft Soren (wp)

Y’a ces nuits sans sommeil, ces nuits où tu te tournes et te retournes dans ton lit, mais tout est bien trop sombre, angoissant. Nuit blanche trop noir, tu entends le tonnerre gronder et resonner dans tout ton être. Tu n’as jamais eu peur de l’orage, Nana, au contraire. Et le mauvais temps n’a rien avoir avec tes insomnies, sauf peut être l’orage tempétueux de ton esprit, qui ne cesse de divaguer. Tu penses, tu penses trop. Tu penses à Nonna et à cette peur incontrôlable qu’t’as de la décevoir. Tu penses à cette rage sourde que tu n’arrives plus à contrôler, aux masques que tu n’as de cesses e porter et aux regards de Soren qui glissent sur une autre que toi. Tu penses à cette fille aussi, et tu n’sais pas pourquoi. Tu penses, tu penses, tu penses et les minutes s’envolent, les heures crient et tu finis par te redresser, dans ton lit. Soupir. T’allumes ta lampe de chevet, cherches ton téléphone pour envoyer un message à Soren, puis deux, puis trois. T’espère si fort qu’il ne dort pas. T’as envie d’le voir, sans vraiment savoir pourquoi. Sa présence te rassure, avec lui, tu as l’impression t’pouvoir échapper à ton quotidien. T’as l’impression d’être un peu plus toi. Vraiment ? Y’a tes doigts qui vont plus vite que tes yeux, qu’ta tête et avant même qu’tu t’en rendes compte, tu lui proposes de te rejoindre, sur la place. Parce qu’y’a l’orage qui gronde, la tempête qui menace d’exploser et putain, qu’est-ce que tu as envie d’voir tout pêter à la lisière de l’eau. Tu r’gardes même pas sa réponse que déjà, t’es debout. S’il ne veut pas venir, tu iras seule, c’est tout. T’fais l’moins de bruit possible. Nonna dort en bas mais la chambre de maman n’est pas très loin et comme toi, elle a le sommeil léger. T’enfiles un jean noir taille haute et un chemisier blanc en satin. T’as le sang chaud, Nana, moitié espagnole, moitié italienne, c’est pas les températures fraiches de ces nuits d’été qui vont t’inquiéter. Tu prends malgré tout ton ciré, un transparent brodé d’étoiles que tu as trouvé sur internet- et tu descends les escaliers sur la pointe des pieds. C’est pas ton genre, de sortir en pleine nuit, c’est plutôt le truc de Charlie, ça. Toi, t’es la fille, la petite fille, la belle-fille et la sœur modèle. Jamais un mot plus haut que l’autre, à la maison. Toujours un sourire aux lèvres et Soren, il s’fout de ta gueule souvent, il dit qu’on dirait une putain d’cyborg. Et il a pas tort, le con. Mais t’as b’soin d’être cet enfant parfait, parce qu’c’était le rôle de Sola, et que comme ça, t’as l’impression qu’elle vit encore en toi. Tu réussis la mission commando et te retrouves finalement dehors. Il pleut légèrement, une brume imperceptible qui forme une couronne autour de tes cheveux. Ça n’a pas encore péter mais ça ne va pas tarder. Alors tu cours, Nana, putain tu cours sous la pluie avec tes air pods dans les oreilles et l’odeur du béton mouiller qui te donne l’envie d’crier, d’hurler dans la nuit étoilée. T’arrives rapidement devant chez lui, et il est là, assis sur son muret. Tu lui souris, lui tend la main en t’approchant. « Allez, dépêche, j’veux voir l’orage fondre dans le lac ! » qu’tu dis, excitée d’pas avoir assez dormis, ces derniers temps.

Il tourne dans son lit, Soren, depuis plusieurs nuits déjà. La soirée chez la marquise qui tourne en boucle dans sa tête. Elle sait. Elle sait, et ça l’emmerde, le Black. Parce que le moins ils sont à savoir, le mieux se porte-t-il. Et en même temps, il ne peut pas nier le fait que le poid du secret se fait plus léger, aussi. Que c’est moins lourd à porter, pour lui. Mais en même temps, c’est la parasite, et ça l’emmerde que ce soit elle. Adolescent rebel qui refuse de voir la réalité en face, préfère faire l’autruche quant à ce qui se joue réellement à l’intérieur de lui, parce que c’est plus simple, de jouer les imbéciles heureux, les aveugles. Enfin… Tant qu’il arrive à dormir. Chose qui est loin d’être le cas pour l’instant, allonger sur le dos, à contempler le plafond en comptant ces putains de moutons blancs qui défilent à l’infini sous ses yeux. Il en envierait presque Abi et son sommeil de plomb, dans la chambre d’à côté. Le portable qui vibre sur la table de chevet vient le tirer de son attente interminable, enfin une distraction digne de ce nom. Nana. Sa copine. A laquelle il ne pensait plus du tout ces derniers jours. Depuis la soirée. Putain le con. Soupçon de culpabilité qui s’insinue dans ses veines alors qu’elle n’a probablement rien remarqué, alors il comprend pas vraiment, le gosse, pourquoi il a l’impression d’avoir fait quelque chose de mal. Il chasse vite ces pensées en voyant son message. La plage, l’orage, rien de mieux pour oublier les tracas de ces derniers temps. Fini les prises de tête. Il attrape un pull qu’il enfile rapidement, saute dans le premier jogging qui traîne avant de se faufiler en silence par la fenêtre, histoire de ne pas réveiller qui que ce soit dans la maison. Il avance à pas de feutré jusqu’au muret où il se pose, en attendant que madame daigne arriver. Les yeux qui se lèvent vers le ciel, les quelques étoiles que l’on peut encore apercevoir, mais surtout les nuages, noirs, menaçants, qui s’avancent à une vitesse impressionnante. Quelques éclairs au loin, le tonnerre qui gronde, se rapproche, et ça a un petit quelque chose d’électrisant, la nature qui se déchaîne. S’il s’est d’abord dit qu’elle avait dû tomber sur la tête pour avoir une idée pareille, il ne regrette finalement pas que Nana l’ait entraîné dans sa folie. Et en parlant du loup, la voilà qui débarque, main tendue, débordante d’excitation, pire qu’une gosse, et ça lui arrache un sourire alors qu’il attrape sa main pour se redresser. “C’est un sacré lac, quand même, t’es au courant ? Genre, y en a même qui appelle ça l’océan, en fait.” Léger rire alors qu’il vient capturer ses lèvres avec douceur, l’espace d’une seconde, avant de passer son bras autour de ses épaules pour prendre la direction de la plage. Et ça a un petit côté rassurant, de l’avoir là, à ses côtés, comme si les idées se remettaient en place naturellement. “Alors madame, on peut savoir d’où vous vient cette folie nocturne ?”