good old days ;; danae

perchée sur ton lit tu contemples ton plafond, les yeux qui brillent. se remplissent d’une tempête. un de ces soirs où les souvenirs sont enivrants, déchirants. illusoire de penser qu’après quelques mois ça n’allait plus te hanter, t’accabler. crescendo de culpabilité, d’envie de tout confesser. une pensée qui te passait bien vite lorsque tu revenais à la réalité et pensait à tes amis impliqués, à qui jamais tu ne pourrais faire ça. bien que la pensée impure, que sur un moment de faiblesse peut-être pourraient-ils le faire, te hantait, un disque en boucle dans ta tête que tu avais besoin de détruire. la paranoïa a son apogée, tu avais besoin d’être rassurée et tu savais à quelle porte toquer pour assouvir ta psychose. ma rouquine préférée, comment tu vas? un simple message qui laisse présager une conversation familière, anodine. qui n’éveillera pas les soupçons. bien que danae mieux que personne savait décrypter tes mots. elle avait bien eu le temps d’apprendre à te cerner en sept ans d’amitié, une amitié fondée sur les bancs de l’école, forgée au fil du temps à l’aide des petits secrets balancés par ci par là. deux caractères si opposés qui savent s’appréhender à la perfection. le regard qui se posent sur chaque recoin de ta chambre, te rappelant tous un souvenir avec elle. tu t’y vois presque. remontant le temps, prenant un instant pour savourer la simplicité barbante de l’époque. que tu supplies de retrouver aujourd’hui. assises sur le divan de la fenêtre, vous regardiez les adolescentes passer, s’extirper du foyer pour aller embrasser la liberté. vous rêvassiez de ce temps, voulant grandir un peu trop vite. loin d’imaginer ce qu’il allait vraiment arriver des années plus tard. tu soupires, cette nostalgie qui te tue, que tu tentes de réprimer sans succès. danae te sort de tes pensées et répond avec plus d’enthousiasme que tu attendais. cet enthousiasme de plus en plus rare, cette personnalité lunaire si timide depuis l’incident. une amitié touchée que tu tentes de conserver maladroitement. fini les politesses, allons droit au but. s’il te plaît viens chez moi ce soir, je m’ennuie à mourir. tu sais que la convaincre sera bien plus compliqué que ça, que l’ennui ne la fera jamais culpabiliser. comme au bon vieux temps, une petite soirée entre filles. appuyer sur la corde sensible, déclencher des souvenirs enfouis, de quoi la faire bouger. rien que pour être sûre tu t’empresses de rajouter pas d’alcool, ni de garçons et encore moins de solar sur les nerfs.. si avec ça, tu ne l’avais pas convaincu.  tu attends impatiemment sa réponse, presque certaine d’avoir réussi à la mettre dans ta poche.

enfermée dans sa chambre danae, le casque sur les oreilles pour se couper de l'ambiance pourrie qui règne à la maison. la musique à fond pour pas entendre les ronchonnements et les plaintes de son père, pour pas entendre le silence assourdissant de sa mère, pour pas essayer de deviner si soren est à la maison en train de boire tout seul ou pas. s'évader, s'imaginer une vie meilleure, s'imaginer une famille meilleure. alors que pourtant, ça pourrait être pire. soren est là, toujours là pour elle, pour la protéger de ses propres conneries et de la menace du paternel. abi est là, avec ses sourires et ses questions, seule source de lumière dans cette baraque remplie de ténèbres. chacun ici apporte un peu plus de noirceur dans la famille. le père alcoolique et violent, la mère lâche et silencieuse, le frère qui se met lui aussi à boire et faire des conneries alors qu'on peut toujours déceler une clarté au fond de lui. danae, qui simule une douce lumière alors que les cendres lui emplissent la bouche et l'empêchent de respirer. abi est l'espoir, mais abi va se retrouver toute seule dans cet enfer quand les deux grands seront partis. des pensées noires, des ruminements qui se ternissent toujours quand elle franchit la porte de la maison. alors danae, elle est bien trop heureuse de recevoir les messages de solar. solar qui croit sûrement devoir la convaincre pour la faire venir, alors qu'à peine invitée, elle se prépare déjà à sortir. elle prend son skate, son seul moyen de locomotion, et raconte qu'elle va réviser jusque tard avec une amie car elles ont un examen le lundi matin, excuse soufflée à la va-vite en passant dans le salon, le joli sourire de la fille parfaite qui est lancé, et déjà elle est partie. sur le chemin elle fait attendre solar, elle fait la difficile. ah je sais pas trop si je vais pouvoir sortir ce soir... alors qu'elle dévale la pente en bas de chez elle. c'est compliqué solar, en plus j'ai la flemme... alors qu'elle descend de son skate pour le prendre à la main lors d'une petite côte. tu veux pas faire ça plus tard plutôt... alors qu'elle n'est plus qu'à quelques minutes de chez la blonde. et enfin, alors qu'elle s'apprête à sonner chez elle, bon ok t'as gagné. son meilleur sourire narquois quand elle voit son amie lui ouvrir la porte. « quel programme nous as-tu préparé ma chère ? » ça lui manque, tout ça. solar, leur amitié, leurs petites soirées tranquilles devant un film ou une série, leurs discussions jusque tard dans la nuit, où chacune en a marre et veut dormir, mais chacune relance un sujet quand même. alors ce soir, c'est juste elles deux, contre le monde.

@solar berlioz

ta tête qui s'remplit déjà de mille et une idées de choses à faire, à lui dire, parce qu'elles se voient plus vraiment. qu'il y a les problèmes de l'une et les mensonges de l'autre. qu'on n'ose pas vraiment se dire, de peur de fêler à nouveau ce semblant d'amitié que vous aviez recréée. cette harmonie entre vous,  cette complicité enviée qui avait fini par se dissiper après l'accident. les cendres de votre amitié gisant sur le sol, vos naïvetés et innocences envolées avec. ce temps te manquait, comme jamais rien ne t'avait manqué. cette nostalgie qui te souriait à chaque coin de rue, cette culpabilité qui t'accompagnait à chacun de tes mouvements. qui c'était faite discrète, moins puissante quand tu étais prise dans ce tourbillon d'examens, de dramas futiles, de soirées oubliées.. la boule au ventre quand tu te rendais compte qu'elle allait passer ton été à t'occuper, il fallait absolument t'occuper. la fuir. ne surtout pas la laisser gagner. et inviter danae, c'était déjà un peu gagner. lui montrer qu'elle n'avait pas pu vous séparer. rien ne le ferait tu avais toujours pensé. et entre deux pinky promise, vous aviez pris un chemin différent. bien que chaque midi il vous ramena à la même table, au même groupe, aux mêmes sourires hypocrites et aux rires qui comblaient presque ces silences  — ces silences qui en disent long. qui te murmurent à l'oreille l'immense connerie que tu as faite. l'esprit qui divague, comme toujours, te ramène à ça. et tu haïs que ce soit une des premières choses à laquelle tu penses quand tu évoques ton amie, ce n'est plus les morales qu'elle avait l'habitude de te faire après que tu aies lancé un pique à amor, ni les listes que vous aviez l'habitude de faire pour noter les garçons au collège, les chewing-gums partagés dans la cour de récré ; ce qui coulait de sens ne l'est plus. alors quand elle te dit qu'elle a la flemme tu peux pas t'empêcher de penser qu'elle se cache derrière son excuse, qu'au fond elle aussi quand elle t'aperçoit, ça la ramène à la pire soirée de sa vie. que ton visage est pénible à voir, à oublier. puis, quelques minutes après, alors que tu te lamentes sur ton sort et que t'en arriverait presque à te boire une bouteille seule, elle te sort de ta tourmente et accepte de venir. et toi tu souris, tu la remercies, essaye de rester détachée face à sa réponse. tu vis pas vraiment pour les grandes déclarations d'amitié et les câlins chaleureux et elle le sait. alors quand tu ouvres la porte et que tu marmonnes c'est pas trop tôt ! elle sait qu'au fond ça veut dire tu m'as tellement manqué. tu l'emmènes immédiatement dans ton antre, prête à passer la plus reposante et réconfortante des soirées à ses côtés. alors... est-ce que se faire nos manucures respectivement et se raconter des potins est trop dépassée pour nos big fat asses? tu ris doucement et sort de sous ton lit une petite boîte poussiéreuse sur laquelle sont gravées vos initiales. je ne sais pas si tu te rappelles de cette boîte.. en tout cas moi j'me rappelle bien du savon que tu m'avais passé après que je l'ai égaré. et bien devine-quoi? je l'ai retrouvé la dernière fois dans mon grenier.  tu l'ouvres doucement, de peur d'abîmer son contenu. tu te rappelles plus très bien de ce qu'elle contient, des années qu'elle avait été perdu. qu'est-ce que tu en avais versé des larmes après ça. tu en sors des photos, danae et toi, avec les garçons, avec amor. mais surtout danae. qui était la seule à savoir l'existence de cette boîte. qui avait eu l'idée de l'arranger à votre effigie. de conter votre histoire, l'amitié que vous partagiez. les souvenirs entassés qui vous ramènent à un souvenir chacune, tu peux pas t'empêcher de sourire comme si tu venais de découvrir le plus beau des trésors et tes yeux qui se remplissent presque de larmes. foutue nostalgie.